Maltraitance animale : pour les forces de l’ordre, des formations pour savoir comment agir

Le 30 septembre dernier, le Sénat a adopté en première lecture un projet de loi de la majorité contre la maltraitance animale. Le texte prévoit notamment l’interdiction des achats impulsifs d’animaux de compagnie mais aussi la formation des forces de l’ordre face ce fléau. Reportage à Toulouse, où des séances de sensibilisation existent depuis janvier.

Ségolène et Célia, éducatrices canin, avancent prudemment avec l’un des chiens de leur pension, un American Staff. Jeudi 7 octobre, des forces de l’ordre assistent à leur formation pour prendre en charge des animaux maltraités. Une personne choisie dans l’assemblée se dirige vers l’animal qui grogne, aboie violemment. Ce chien, considéré comme dangereux par la législation, et qui réagit comme peuvent parfois le faire des animaux malmenés, nécessite des gestes adaptés. “Vous ne devez surtout pas le regarder dans les yeux. Il va traduire cela comme une provocation”, conseille l’une des éducatrices. Une participante s’approche doucement du chien tout en respectant une distance de sécurité, indispensable. L’animal, lui, continue à se montrer défensif et saute sur un participant cobaye, tout en étant retenu en laisse par l’éducatrice canin.

Dans la réalité, les gendarmes ou policiers n’ont, à l’heure actuelle, pas de formation pour faire face à ce type de comportements. Lors d’une intervention, leur rôle est surtout de s’occuper du sort de l’animal, plus que de se protéger face à lui : “C’est la fourrière qui prend en charge le chien. Nous, nous devons surtout décider de son avenir, vers quels associations ou refuges se tourner. Parfois, on se demande quoi faire du chien”, confie Vincent F., gendarme à la police judiciaire des Hautes-Pyrénées.

Un manque de moyens et de connaissances

Pour lui, les forces de l’ordre manquent également de moyens pour traiter au mieux les affaires de maltraitance, qu’ils voient pourtant au quotidien. “Nous avons beaucoup de signalements. On manque souvent de temps et de connaissances pour faire de réelles enquêtes sur ces affaires, regrette Vincent F. Il est parfois compliqué aussi de reconnaître des cas de maltraitance. On échange beaucoup entre collègues, car on voit souvent des cas lorsque l’on part en intervention pour violences conjugales.”

En plus des gestes à adopter, pendant leur formation, les forces de l’ordre reçoivent aussi de nombreux éléments juridiques sur le sujet. Car en la matière, il y a beaucoup de travail à réaliser. “La difficulté, c’est que peu d’agents connaissent les peines encourues et souvent, les propriétaires fautifs ne sont pas poursuivis”, explique Céline Gardel, capitaine de police et formatrice pour cette session près de Toulouse. Les sévices graves et les actes de cruauté sur un animal sont punis de deux ans d’emprisonnement et de 30.000 euros d’amende.

Il est parfois compliqué de reconnaître des cas de maltraitance animale.

Vincent F., gendarme dans les hautes-pyrénées

Bientôt une brigade contre la maltraitance animale ?

En plus de leur formation, l’enjeu pour les forces de l’ordre est la prise en compte des affaires de maltraitance par la justice. “Nous n’avons pas assez de magistrats spécialisés sur la question”, regrette Céline Gardel. Cette dernière travaille également à la sensibilisation du personnel juridique avec Marion Bouilaud, avocate spécialisée dans le droit animal, au sein de l’association de protection animale Les 4 Pattounes.

Le projet de loi contre la maltraitance animale adoptée en première lecture au Sénat le 30 septembre pourrait, selon Céline Gardel, “faire avancer le débat”. Un texte qui prévoit plusieurs dispositions, aussi bien pour les animaux domestiques que les animaux sauvages maintenus en détention, et plus de formation pour les forces de l’ordre.

Céline Gardel souhaite également que soit inscrite dans cette loi la création de la première brigade contre la maltraitance animale. En attendant, elle continue à former les policiers, comme ce jeudi après-midi. Et elle a déjà a obtenu l’obligation d’une formation sur la maltraitance animale dans les écoles de police en 2022.

Emilie Dias

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