A Calais, “humiliation” et “harcèlement” quotidiens des migrants dénonce human rights watch

Dans un rapport publié le jeudi 7 octobre, l’ONG Human rights watch (HRW) dénonce “les pratiques de la police” qui ont rendu la vie des migrants “misérable” sur le littoral nord, notamment à la “jungle” de Calais.

Expulsions quotidiennes, tentes lacérées, biens confisqués… Dans un rapport publié jeudi 7 octobre, l’ONG Human Rights Watch (HRW) pointe du doigt une “humiliation et un harcèlement quotidiens” des migrants et une “politique de dissuasion” mise en oeuvre par l’Etat sur le littoral nord. Dans cette publication qui intervient cinq ans après le démantèlement de l’immense campement de la “jungle” de Calais, HRW estime que “les pratiques de la police” sur le littoral “ont rendu la vie des migrants de plus en plus misérable”.

A Calais, Grande-Synthe et leurs environs, plus d’un millier de personnes vivent toujours dans les zones boisées, des entrepôts désaffectés ou sous les ponts, dans l’espoir de rejoindre le Royaume-Uni. La police y couple “des expulsions de masse périodiques” avec “des opérations routinières” qui poussent les exilés à se déplacer continuellement, “pendant que les agents confisquent les tentes qu’ils n’ont pu emporter avec eux, les tailladant souvent pour qu’elles ne soient plus utilisables”, écrit l’ONG. “Quand la police arrive, nous avons cinq minutes pour sortir de la tente avant qu’elle ne détruise tout”, témoigne ainsi Rona D., une Kurde irakienne citée dans le rapport.

950 opérations d’expulsions à Calais en 2020

“Rien ne peut justifier de soumettre des personnes à une humiliation et un harcèlement quotidiens”, a estimé Bénédicte Jeannerod, directrice pour la France de HRW. “Si l’objectif est de dissuader les migrants de venir dans le nord de la France, ces politiques sont un échec flagrant et plongent les personnes dans une profonde désolation.” Selon le HRO (Human Rights Observers), une association qui s’est spécialisée dans le suivi de la situation migratoire sur le littoral nord, la police a procédé en 2020 à plus de 950 opérations d’expulsions “de routine” à Calais, 90 à Grande-Synthe, lors desquelles elle a saisi 5.000 tentes et bâches.
L’ONG a enquêté sur place d’octobre à décembre 2020, puis en juin et juillet 2021, interrogeant notamment 60 migrants. Elle dénonce également les “restrictions à l’aide humanitaire”, qui se sont cristallisées dans de récents arrêtés interdisant la distribution de nourriture et d’eau par certaines associations dans le centre-ville de Calais.

Une stratégie assumée par le ministère de l’Intérieur, qui n’a pas répondu aux sollicitations de l’AFP. Gérald Darmanin expliquait en juillet à la Voix du Nord : “La consigne que j’ai donnée pour éviter de revivre ce que les Calaisiens ont connu il y a quelques années, c’est la fermeté des forces de l’ordre”, qui se traduit par “des opérations toutes les 24 ou 48 heures”.

Face à ce constat, sur lequel associations, autorités indépendantes et défenseurs des droits de l’homme alertent depuis des années, Human Rights Watch exhorte la France à “rompre le cercle vicieux des expulsions et des harcèlements répétés”. Le démantèlement de la “jungle” devait “mettre fin à une situation indigne”, souligne Bénédicte Jeannerod, “mais la situation actuelle est, à bien des égards, elle aussi indigne.”

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