En grève, les sages-femmes réclament une refonte de leur formation

Les sages-femmes se sont mobilisées jeudi 7 octobre. Reconnaissance, revalorisation salariale, les revendications sont multiples. Parmi elles, l’instauration d’une sixième année d’études. 

Pour la quatrième fois depuis la rentrée, les sages-femmes, dont plus de 97 % de la profession est féminine, sont descendues dans la rue, à Paris, rejointes par les étudiantes en formation. Outre une revalorisation salariale, les syndicats réclament une refonte des études, notamment la durée du cursus et l’encadrement. Car le malaise dans la profession prend ses racines dès la formation : « Les sages-femmes ne sont pas respectées, les étudiantes non plus », alerte Camille, en quatrième année à Reims. 

Un programme trop dense 

Une des principales revendications des syndicats est l’ajout d’une sixième année d’étude. « Avec cette sixième année, on aimerait six mois de stage pré-professionnel dans le lieu où on veut exercer, ce qui permettrait d’être plus autonome quand on arrive pour travailler », imagine Laura Faucher, présidente de l’Association nationale des étudiants sages-femmes (ANSEF), lors du 18h30 de France 3 Paris – Île-de-France. En plus de faciliter l’insertion, cela pourrait surtout alléger la formation, jugée trop dense. C’est justement le thème de la pancarte que Camille a préparé pour la manifestation parisienne. « Quand on n’a pas cours, on est en stage, quand on n’a pas stage, on a le mémoire », dénonce la jeune femme, épuisée. 

D’après l’ANESF, le volume horaire du cursus dépasse de plus de 1.000 heures celui des autres filières médicales. « Le calcul est facile : sur un rythme de 35h / semaine, 1.246 heures représentent 36 semaines, soit quasiment une année scolaire », relève le syndicat étudiant dans un communiqué publié le 7 octobre.

Le volume horaire se base sur les référentiels datant de 2011 pour le premier cycle et de 2013 pour le deuxième cycle. Des programmes qui ne reflètent pas les nouvelles qualifications des sages-femmes. En effet, le champ de compétences n’a fait que s’élargir ces dernières années : vaccination, dépistage des infections sexuellement transmissibles, interruption volontaire de grossesse. « Le suivi gynécologique a été ajouté mais en théorie, à l’école, on n’étudie pas grand chose et sur le terrain ça se complique », décrit Laura Brocq, fraîchement diplômée. 

Un mal-être grandissant chez les étudiants

Elle reste mitigée face à l’instauration d’une sixième année. Si ça peut être l’occasion d’étaler les cours sur une plus grande période, elle craint une nouvelle année « à être exploitée ». Lors des stages qui se multiplient lors du cursus, une grande partie des étudiantes affirment être considérées comme des sages-femmes. En cause, un manque d’effectif criant. « J’ai une amie qui s’est retrouvée à accoucher une femme toute seule au début de son cursus parce que la sage-femme s’occupait déjà de plusieurs patientes », se remémore-t-elle. 

Face aux conditions de stages, la vision du métier qui se dégrade et la lourdeur du programme, de nombreux étudiants font état de souffrance psychologique. « Lors de ma deuxième année, j’ai commencé une dépression qui s’est accentuée avec le temps », avoue Laura. Son cas n’est pas isolé puisque comme elle, plusieurs de ses camarades se sont rendus chez des psychologues. Selon une enquête de 2018 de l’ANESF, près de 7 étudiants sur 10 présentent des symptômes dépressifs. Ce qui pousse certains à abandonner leur études. Toujours selon l’enquête de l’ANESF, 27 % des étudiants sages-femmes ont déjà pensé à arrêter leurs études. Dans la classe de Camille, ils sont près de la moitié a avoir quitté l’école.

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